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2020/05 > La simple détention par un entrepositaire de produits portant atteinte à un droit de marque ne constitue pas un usage de marque

CJUE, 2 avr. 2020, aff. C‑567/18, Coty Germany GmbH c/ Amazon Services Europe Sàrl et a.

Dans cette décision attendue, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), sur question préjudicielle, s’est prononcée le 2 avril dernier sur la responsabilité de l’entrepositaire Amazon à propos de la vente par un tiers sur la place de marché en ligne, Amazon-Marketplace, de flacons de parfum pour lesquels les droits n’étaient pas épuisés.

COTY GERMANY (ci-après dénommé COTY), entreprise allemande titulaire d’une licence sur la marque DAVIDOFF n° 876 874, avait en effet constaté par un achat-test que le parfum « Davidoff Hot Water EdT 60 ml », était offert à la vente par un revendeur « dans la partie « Amazon-Marketplace » du site Internet www.amazon.de ». La Marketplace d’Amazon permet ainsi à des vendeurs tiers de participer au programme « Expédié par Amazon ». Les produits y sont stockés par des sociétés du groupe Amazon et l’expédition est faite par des prestataires externes.

COTY a alors assigné en contrefaçon les différentes sociétés impliquées du groupe AMAZON devant le Landgericht (Tribunal régional allemand). Le Landgericht dans un premier temps puis la juridiction d’appel ensuite ont rejeté cette action notamment à l’encontre de l’entrepositaire AMAZON FC GRABEN au motif que cette dernière avait conservé ces produits pour le compte de vendeurs tiers.

COTY a ensuite formé un pourvoi en Révision. Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice allemande)  a décidé alors de poser une question préjudicielle portant sur l’interprétation de l’article 9 .2, b), du règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009, dans sa version antérieure à sa modification par le règlement (UE) 2015/2424 du 16 décembre 2015 ainsi que de l’article 9. 3, b), du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017.

Ainsi une personne qui stocke pour un tiers des produits portant atteinte à un droit de marque sans avoir connaissance de cette atteinte peut-elle être considérée comme détentrice de ces produits aux fins de leur offre ou de leur mise sur le marché dans le cas où ce n’est pas elle mais le tiers qui, seul, entend offrir les produits ou les mettre sur le marché ? 

Sur l’opération d’entreposage et la notion de « faire usage » : une question de finalité

La Cour rappelle en premier lieu que ni le règlement no 207/2009 ni le règlement 2017/1001 dans leurs articles 9 ne définissent la notion de « faire usage » mais qu’elle a déjà eu l’occasion de la préciser dans différents arrêts (points 36 à 44).

Selon la Cour la notion de « faire usage » selon « « son sens habituel » implique un comportement actif et une maîtrise, directe ou indirecte, de l’acte constituant l’usage » (point 37).

La Cour y ajoute que pour que « l’entreposage de produits revêtus de signes identiques ou similaires à des marques puisse être qualifié d’« usage » de ces signes, encore faut-il, (…) que l’opérateur économique effectuant cet entreposage poursuive lui-même la finalité visée par ces dispositions, à savoir l’offre de produits ou en leur mise dans le commerce ».

En l’espèce, le vendeur tiers bénéficiaire de la place du marché en ligne, lui seul, offre les produits ou les met dans le commerce. Pour qu’un usage de la marque soit constitué, il aurait fallu ainsi que l’entrepositaire poursuive lui-même la finalité d’offrir les produits à la vente ou les mette dans le commerce.

La CJUE dit ainsi pour droit « L’article 9, paragraphe 2, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque [de l’Union européenne], et l’article 9, paragraphe 3, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’une personne qui entrepose pour un tiers des produits portant atteinte à un droit de marque sans avoir connaissance de cette atteinte doit être considérée comme ne détenant pas ces produits aux fins de leur offre ou de leur mise dans le commerce au sens de ces dispositions si cette personne ne poursuit pas elle-même ces finalités. »

Dès lors, le simple entreposage de produits par Amazon pour le compte d’une société tierce ne constitue pas un acte de contrefaçon, AMAZON, en tant qu’entrepositaire, ne détenant pas ces produits aux fins de les offrir ou de les mettre dans le commerce elle-même.

La CJUE dans son communiqué, précise toutefois que « d’autres dispositions du droit de l’Union, notamment celles relatives au commerce électronique et au respect des droits de propriété intellectuelle, permettent d’agir en justice contre un intermédiaire qui a permis à un opérateur économique de faire illégalement usage d’une marque ».

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