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2016/05 > Liens internet et communication au public

La décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) à venir dans l’affaire opposant la société GS Media BV (GS Media) à la société Sanoma Media Netherlands BV (Sanoma), éditeur du magazine Playboy, sera d’un grand intérêt en raison des faits très actuels qu’elle aura à traiter, liens et mise à disposition d’œuvres sur internet. A cette occasion, les conclusions de l’avocat général Melchior Wathelet (Aff. C-160/15) se sont prononcées sur l’interprétation à donner de l’article 3 parag.1 de la Directive du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, article qui dispose que « Les États membres prévoient pour les auteurs le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute communication au public de leurs œuvres, par fil ou sans fil, y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement. »

En l’espèce, la société GS Media avait fourni sur son site internet un lien cliquable vers d’autres sites où des photos d’une personnalité, destinées à être publiées dans un numéro à paraître de l’édition néerlandaise de Playboy, étaient consultables sans que l’éditeur du magazine, Sanoma, titulaire des droits, l’ait autorisé. Les juridictions néerlandaises saisies de la question de savoir si la mise en place d’un tel lien constituait une violation des droits d’auteur de Sanoma ont alors rendu des décisions contradictoires.

Saisie en cassation, la cour suprême des Pays-Bas relève de son côté que si ces photographies étaient difficiles d’accès sur les sites où elles avaient été publiées, le lien cliquable à partir du site de Sanoma avait facilité un tel accès. Par ailleurs, la Cour rappelle que les faits de ce litige ont déjà été tranchés par  un arrêt rendu par la CJUE le 13 février 2014  (Aff. C-466/12 – Svensson). La Cour avait en effet posé dans cette décision, le principe que (i) la fourniture d’un lien est une communication au public et que (ii)  l’autorisation du titulaire des droits d’auteur est nécessaire si ce lien permet une communication à un public nouveau. Elle en avait déduit que la fourniture sur un site internet de liens cliquables vers des œuvres déjà disponibles sur un autre site n’était pas un acte de communication au sens de l’article 3 parag.1 de la directive puisqu’il ne permettait pas une communication à un public nouveau.

Dans l’affaire présente, y avait-il eu communication à un public nouveau et l’autorisation du titulaire des photographies est–elle nécessaire à la création de ces liens hypertextes renvoyant à des contenus accessibles sur le site d’origine ? La cour suprême des Pays-Bas décide en dépit de la décision précédemment rendue dans l’affaire Svensson, de surseoir à statuer et d’interroger à nouveau la CJUE.

Dans ses conclusions, l’avocat général Melchior Wathelet rappelle que  l’auteur dispose d’un droit exclusif de contrôle de la communication au public de ses œuvres au sens de l’article 3 parg.1.

Toutefois, « Ne constitue pas un acte de communication au public le placement sur un site internet d’un hyperlien vers un autre site internet sur lequel des œuvres protégées par le droit d’auteur sont d’ores et déjà librement accessibles au public sans l’autorisation de l’auteur. »

D’autre part, le fait pour celui qui place le lien de savoir ou d’être censé « savoir que le titulaire du droit d’auteur n’a pas autorisé le placement des œuvres en question sur cet autre site internet n’est pas pertinent », en l’absence d’un acte de communication. Enfin, l’Avocat général considère que le critère de public nouveau n’est pas non plus applicable puisque le titulaire du droit n’a pas autorisé la communication initiale et que de surcroît, l’intervention de GS Media est indifférente à la mise à disposition à un public nouveau.

Ainsi la mise en place de ce lien n’est en l’espèce pas sanctionnable au titre des droits d’auteur.

Cependant, l’Avocat général Wathelet appelle à la vigilance de la Cour des Pays-Bas s’agissant de la libre accessibilité ou non des internautes à des sites tiers. Il précise à cet égard que si l’hyperlien mis en place par GS Media sur son propre site permettait l’accès à des œuvres protégées publiées sur des sites tiers, ayant mis en place des restrictions d’accès, de sorte que les utilisateurs du site de GS Media pouvaient les contourner, cette mise à disposition devrait alors être considérée comme un acte de communication nécessitant l’autorisation du  titulaire des droits.

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