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2014/06 > La protection des secrets d’affaires : un levier pour l’innovation ?

Le programme Recherche-Développement et Innovation lancé en 2010 par la Commission européenne a prévu de donner aux entreprises et organismes de recherches non commerciaux les moyens juridiques permettant de protéger les connaissances particulières qu’ils sont amenés à développer.

Non susceptibles d’une appropriation par les droits de propriété intellectuelle, ces « informations commerciales confidentielles » ou « renseignements non divulgués » (savoir-faire, plans d’affaires, fichiers clients-fournisseurs, stratégies de marché…), autrement dénommées secrets d’affaires, n’en sont pas moins des avantages compétitifs, souvent la cible d’espionnage et de vols.

Différente études menées à l’échelon européen ont montré que dans les différents pays de l’UE, des moyens juridiques ont été mis en œuvre pour tenter de protéger ces secrets d’affaires contre leur usage par un tiers qui les aurait obtenus par des moyens illégitimes.  Selon les Etats, cette protection s’organise autour du droit pénal, du droit civil, par le biais d’une action en concurrence déloyale, au moyen de dispositions légales spécifiques ou simplement au moyen d’une construction jurisprudentielle. Ces disparités rendent au final cette protection peu efficace.

La Commission européenne a donc présenté une proposition de Directive pour la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre leur obtention, leur utilisation et leur divulgation illicites (COM 2013 813 final). Les règles ainsi proposées, une fois adoptées, devront être introduites dans la législation de chaque Etat-membre de l’UE.

Quatre chapitres composent cette proposition de Directive. Le secret d’affaires est défini au chapitre I au travers de trois critères cumulatifs. L’information doit être secrète (non connues et non accessibles aux personnes des milieux intéressés par le domaine d’information concerné), tenir sa valeur commerciale de ce secret et avoir été gardée secrète au moyen de dispositions raisonnables par celui qui en a le contrôle, dénommé le « détenteur ».

Le chapitre II de la proposition de Directive est consacré à l’obtention, l’utilisation et la divulgation de secrets d’affaires sans l’autorisation du détenteur ou à la suite d’un comportement négligent.

Est ainsi illicite l’obtention d’un secret d’affaires hors du consentement de son détenteur, du fait d’un comportement intentionnel ou à la suite d’une négligence grave : vol, abus de confiance, corruption, incitation au/ou non-respect d’une obligation de confidentialité, copie ou accès à une information non autorisée et plus largement à tout comportement considéré comme contraire aux usages commerciaux honnêtes.

L’utilisation et la divulgation de ce secret d’affaire sans l’autorisation de son détenteur sont également sanctionnées si elles résultent de l’obtention illicite de ce secret, d’une violation d’un accord de confidentialité, de la violation d’une obligation de garder l’information secrète ou d’une utilisation hors des limites  prévues par contrat. Agit de même en contravention des dispositions de la Directive, celui qui utilise ou divulgue une information secrète tout en sachant ou ne pouvant ignorer qu’il la détient d’une personne l’ayant obtenu de façon illicite. De même encore, est considéré comme un usage illicite d’un secret d’affaires, la production, l’offre et la mise sur le marché intentionnelles de produits en infraction, ainsi que l’importation, l’exportation et le stockage à ces mêmes fins.

La proposition de Directive prévoit toutefois un certain nombre de cas où l’obtention de ce secret d’affaires est considéré comme licite (découverte, création, observation, étude ou démontage d’un produit…) ou résulte de circonstances particulières (usage légitime du droit à la liberté d’expression ou d’information, révélation d’une faute ou d’une activité illégale, protection d’un intérêt légitime…)

Le chapitre III de la proposition de Directive est relatif aux mesures provisoires et conservatoires avant toute procédure au fond et aux mesures définitives résultant d’un jugement au fond. Les produits en infraction peuvent être saisis, voir détruits. Les dommages et intérêts sont prononcés en considération du manque à gagner de la partie lésée, des bénéfices injustement réalisés par le contrevenant et du préjudice moral causé. Peut également être pris en compte pour l’évaluation des dommages et intérêt, le montant des redevances ou droits qui aurait été versé si le contrevenant avait demandé l’autorisation d’utiliser ledit secret d’affaires.

Ce chapitre prévoit aussi l’aménagement des actions en justice de sorte à permettre la préservation des informations confidentielles pendant et après le procès.

Le délai de prescription, un an au moins, deux ans maximum à compter de la date à laquelle le détenteur a connaissance du dernier fait donnant lieu à l’action ou aurait dû en avoir connaissance, est court, mais justifié par l’intérêt de la sécurité juridique et aussi parce qu’un devoir de diligence pèse sur le détenteur de ce secret d’affaire. Ce délai est toutefois encore discuté et pourrait être allongé à six ans.

Au final ce texte s’il est adopté pourrait permettre de remplir un triple objectif : protéger les secrets d’affaires uniformément au niveau européen, limiter les risques de leur appropriation illicite et permettre aux entreprises d’échanger pour innover et ainsi développer leur compétitivité, sans craindre de voir leurs secrets d’affaire appropriés sans pouvoir réagir.

Il reste que la définition même du secret d’affaire risque de demeurer une notion difficile à définir et dès lors difficile à protéger en pratique, malgré les dispositions de cette Directive et ce d’autant que les conditions d’obtention, licites ou illicites, de ce secret risquent aussi d’être difficiles à appréhender en pratique.

Brève : Le décret n° 2014-650 du 24 juin 2014 modifiant le Code de la Propriété Intellectuelle a été publié. Il prévoit notamment qu’à compter du 1er juillet 2014, toute demande d’enregistrement d’un titre de propriété industrielle doit être déposée uniquement au siège de l’Institut National de la Propriété Industrielle ou y être déposé par pli postal ou par tout mode de télétransmission.

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